Le saxophone était le troisième instrument de
l'orchestre, après l'accordéon et la batterie. Nous étions cinq ou six
saxophonistes à nous partager les affaires. Nous faisions souvent les bals de
mariage en campagne, clientèle pas difficile à l'époque. Certains invités
venaient nous chercher, car nous n'avions pas de moyen de locomotion. Mais pour
le retour, il n'y avait plus personne en état de conduire. Le lendemain matin,
on attendait une occasionnelle voiture "celle du laitier par
exemple", ou le petit train qui nous prenait une partie de notre cachet.
Pour les bals du dimanche, que ce soit sur les
affiches ou le journal, on annonçait les séances avec la participation d'un
"orchestre réputé", ou aussi "orchestre de choix". Le
"réputé" avait beaucoup d'affaires souvent le même jour et à la même
heure...
L'ambiance entre les musiciens était bonne, il n'y avait entre nous aucune jalousie ni concurrence étant donné que le nombre de musiciens était inférieur à la demande.
L'ambiance entre les musiciens était bonne, il n'y avait entre nous aucune jalousie ni concurrence étant donné que le nombre de musiciens était inférieur à la demande.
Mais la guitare dans tout cela ?
Il y avait plusieurs guitaristes, mais comme les
amplificateurs n'existaient pas, on ne les entendait pas. Le problème était le
même pour la contrebasse à cordes, et avant la guitare, le banjo, beaucoup plus
sonore, était parfois utilisé.
Puis apparurent les premiers amplis, des
"Stimer". Quelle catastrophe, car désormais, on entendait les fameux
pseudo-guitaristes habituels. Et à part certains, on a vite regretté leur
anonymat sonore. Heureusement, la relève est arrivée, pour notre bonheur.
Tous les remplacements n'étaient pas agréables,
car nous pouvions être demandés par des musiciens que l'on ne connaissait pas,
souvent dans les bourgs pour les fêtes.
Les accordéonistes jouaient "de
routine", selon l'expression du moment: on reconnaissait vaguement la
mélodie originale. J'ai vu un batteur avec un tambour de garde-champêtre et les
baguettes à bouts ferrés posés sur un chevalet servant à scier du bois.
L'accordéoniste était fâché avec les altérations,
ce qui changeait singulièrement la ligne mélodique. Je le lui fis remarquer,
mais comme il jouait souvent pour le même public, il me fit cette réflexion:
"Que veux-tu? Maintenant, ils le connaissent comme cela...." A se demander si l'on n'aurait pas l'air de se
tromper en jouant la véritable mélodie. Et il a fallu faire deux séances avec
cet attelage, le cachet était bien mérité !Heureusement, les clients n'étaient pas difficiles, et contents de pouvoir danser, ayant été privés de ce plaisir pendant la guerre. A Rennes, de bons musiciens se produisaient, mais il n'en était pas de même dans les secteurs éloignés.
Il y avait pour se perfectionner les harmonies
(cinq ou six à Rennes). Le summum était "l'Harmonie Municipale" par
son nombre d'éléments, un répertoire difficile et nous étions rétribués, y
compris pour les répétitions. Cela n'empêchait pas les autres sociétés de nous
solliciter pour leurs concerts. Nous avions une casquette de chaque société, en
faisant bien attention de prendre la bonne le bon jour. A l'Harmonie
Municipale, nous avions le costume complet ressemblant à des tenues militaires,
et il n'était pas rare de se faire saluer par les jeunes appelés lors de leur
première sortie. C'est vrai que l'on avait un peu l'air d'officiers de marine
ou d'aviation.
L'Harmonie Municipale animait aussi les bals du
14 juillet place de la mairie, en formation réduite.
Pour le répertoire, il était distribué à la fin
de chaque morceau les partitions du suivant, partitions reçues de la part
souvent d'illustres inconnus, donc lecture à vue et rendez-vous à la fin (entre
nous, nous disions " rendez-vous à la coda...". Des pancartes
préparées à l'avance, servant d'une année sur l'autre, annonçaient la danse
jouée, c'était plus prudent. Il n'y avait rien de compliqué, mais deux règles
principales s'imposaient:
1° si vous avez fini de jouer et que les autres continuent, gardez l'instrument en bouche sans souffler et en remuant les doigts,
2° si les autres ont fini et qu'il vous reste des notes, ne les jouez pas...
1° si vous avez fini de jouer et que les autres continuent, gardez l'instrument en bouche sans souffler et en remuant les doigts,
2° si les autres ont fini et qu'il vous reste des notes, ne les jouez pas...
Mais la situation des orchestres évoluait: après
quelques trajets en bicyclette, nous eûmes des scooters, certains avaient même
une voiture.
Pour ce qui est de la musique, on demandait aux
saxophonistes de pratiquer aussi la clarinette qui se mariait mieux avec le son
de l'accordéon.
Nous avions obtenu de jouer tous les dimanches
après-midi dans une nouvelle salle du cercle Paul Bert à Clemenceau. C'était
beaucoup plus agréable et motivant, d'autant plus que de nouveaux styles de musique
émergeaient, en particulier dans le domaine typique (mambo etc.), ce qui
nécessitait des ensembles plus importants (environ cinq éléments).
Lors de mes débuts il n'y avait pas pratiquement jamais de sonorisation. Dans des endroits peu sonores comme des parquets bâchés il était difficile de se faire entendre.
A cette époque les marchands de bouchons d'oreille, préconisés maintenant pour les concerts de musique actuelle, n'auraient pas fait fortune.
Parmi les premières sonorisations dont j'ai souvenance la marque " Bouyer " arrive en tête. Lorsque nous avions la chance d'avoir un ampli 20 watts, deux haut-parleurs et un micro mélodium, c'était le bonheur.
Lors de mes débuts il n'y avait pas pratiquement jamais de sonorisation. Dans des endroits peu sonores comme des parquets bâchés il était difficile de se faire entendre.
A cette époque les marchands de bouchons d'oreille, préconisés maintenant pour les concerts de musique actuelle, n'auraient pas fait fortune.
Parmi les premières sonorisations dont j'ai souvenance la marque " Bouyer " arrive en tête. Lorsque nous avions la chance d'avoir un ampli 20 watts, deux haut-parleurs et un micro mélodium, c'était le bonheur.
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